Ohayou
Décembre 2022

La ville de Kanazawa se trouve sur la côte ouest du Japon, à la hauteur de Tokyo, au centre de la grande île de Honshū. On la surnomme parfois « Le petit Kyoto » et elle le mérite.

C’est la deuxième ville que j’ai découverte au Japon lors de mon premier voyage en juin 2018, c’est là que je suis définitivement tombé amoureux du Japon.

Je suis arrivé en fin de journée, l’appartement que j’avais loué était magnifique, beaucoup trop grand pour moi, mais situé au cœur d’un quartier purement japonais à quelques minutes de l’ancien quartier de plaisir, nom que l’on donnait au quartier où exerçaient les Geishas.

Il reste quelques Geishas professionnelles à Kanazawa. Un jour, en me baladant, j’ai eu la chance d’en voir une sortant d’une énorme limousine. Autour d’elle, c’est comme si le temps s’était arrêté, tout le monde autour de moi, Japonais y compris, était subjugué par l’incroyable grâce et l’impressionnante majesté de cette femme. Cela n’a duré que quelques instants, elle a disparu rapidement dans une maison de thé du quartier d’Higashiyama, mais c’était réellement magique. Comme la floraison des cerisiers, cela ne dure qu’un instant, cette impermanence sublime est un élément fondamental de la culture du Japon.

Dans mon appartement je suis accueilli par une jeune française qui m’explique pendant une heure ce qu’il faut savoir sur Kanazawa. Je suis ses conseil et je vais à pied dans le quartier de Nagamachi, près de la rivière Saigawa, une quarantaine de minutes de marche, mon appartement est près de l’autre rivière de Kanazawa, l’Asano. Nagamachi est le cœur de l’animation dans la vieille ville et lorsque j’y arrive, je me rends compte que ça ne va pas être facile. Il y a des bars et des restaurants partout et un monde fou.

Ça se passe plutôt mal, je me fais refuser l’entrée dans plusieurs restaurants et je commence à me dire que hors de Tokyo je fais face à une sorte de racisme anti-occidental auquel je ne m’attendais pas. En fait, ce n’est pas le cas, parfois on me refuse l’entrée par ce que le restaurant est vraiment plein, mais parfois aussi parce personne ne parle anglais et que tous les menus sont en japonais, donc impossible d’expliquer ce qu’on peut manger. C’est une situation qui met les Japonais très mal à l’aise, alors ils préfèrent refuser le client, mais à ce moment-là, je ne le sais pas encore.

Finalement, après une bonne heure de recherches infructueuses où j’ai l’occasion d’entrevoir la beauté de la ville, j’entre dans un restaurant vide, celui de Yasu.

Au Japon, la plupart du temps, même dans les grandes villes, on ne voit pas l’intérieur des restaurants depuis l’extérieur, particulièrement des Izakaya. Il y a de la lumière, des panneaux coulissants translucides, mais pas de fenêtres. Ce qu’on y mange est inscrit à l’extérieur en japonais, tout est donc mystérieux pour un gaijin comme moi qui ne parle pas un mot de la langue. Mais j’avais déjà appris à ouvrir les portes coulissantes, à mettre le nez dans l’endroit pour y respirer l’ambiance et tenter ma chance.

Yasu m’accueille avec un grand sourire, me fait signe de m’assoir au bar de son Izakaya qui comporte six places et me dit quelque chose en japonais que je ne comprends pas. Yasu ne parle pas anglais, à part quelques mots. L’application de traduction a chauffé ce soir-là, je suis resté plus de deux heures dans son restaurant, Yasu m’a fait un repas sur mesure absolument succulent, il est allé me chercher des bières quelque part dans la rue et il m’a fait découvrir mes premiers vrais Sakés. Yasu est devenu mon ami ce soir-là, il l’est toujours.

Cette semaine, je suis allé dans son nouveau restaurant, sur la rive de la rivière Saigawa. Je ne l’avais pas prévenu, je voulais lui faire la surprise. Il m’a reconnu immédiatement, après plus de trois ans, il est venu me prendre dans ses bras, ce qui est exceptionnel pour un Japonais, et il s’est mis à pleurer. A son bar, deux Japonais médusés arrêtent leur dîner, regardent la scène, sourient et applaudissent !

Ce premier dîner à Kanazawa chez Yasu en 2018 m’avait mis en confiance, il m’avait permis de découvrir la gentillesse et la sensibilité d’un Japonais, sa curiosité aussi pour les Occidentaux. J’étais donc reparti confiant et motivé à la découverte de Nagamachi avec l’envie de trouver un bar où vivre une nouvelle expérience. L’alcool aidant, j’étais plus téméraire ; je n’avais encore rien vu, mais ça, je ne pouvais pas le savoir.

Il y a du monde partout et il y a des bars partout, au niveau de la rue mais aussi à l’étage, ils sont généralement minuscules, j’en vois même un où il n’y a que deux places !  Le problème c’est qu’on ne voit quasiment jamais l’intérieur et cela reste un peu intimidant. Je trouve mon bonheur, un bar assez grand, aux vitre translucides, je vois qu’il y a du monde, mais il reste de la place, je rentre.

Quand on rentre dans un bar, un restaurant, un café ou un magasin au Japon, on est accueilli par de tonitruants いらっしゃいませ criés par tout le personnel proche de l’entrée. Parfois c’est un peu effrayant tant c’est sonore, mais c’est simplement la manière d’accueillir un client au Japon.

いらっしゃいませ
Irashaimase – bienvenue.

Apparait alors Mari qui dirige ce bar, le ランプ, elle m’accueille personnellement comme elle le fait toujours pour les clients importants où les gaijin comme moi. Elle me propose une place au bar et me fait comprendre que je peux lui demander à boire. Je commande une 生ビール , littéralement une bière crue ou fraîche, à la pression donc, c’est Yasu qui me l’a appris.

ランプ
Ranpu – lampe.

生ビール
Namabirru – bière pression.

Mari demande à une serveuse de s’occuper de ma bière et elle utilise son traducteur pour me dire qu’elle va m’amener quelqu’un qui parle anglais. Je ne suis pas très chaud à l’idée de me retrouver à discuter avec un Occidental, mais elle revient une minute plus tard avec un Japonais en chemise hawaïenne et en short, et, c’est très important, sans chaussettes. Takashi déteste les chaussettes !

Takashi est réservé, comme la plupart des hommes japonais, mais il parle très bien anglais et c’est vraiment rare au Japon. Il est biologiste, chercheur à l’université de Kanazawa, il a travaillé dans un laboratoire aux États-Unis, il joue du Bach ou du Chopin dès qu’il rencontre un piano, et il déteste les chaussettes !

Takashi va devenir mon meilleur ami japonais ! Il va me faire découvrir la culture, la langue, les coutumes, les particularités du Japon. Pendant une semaine on ne va plus se quitter et on va beaucoup boire et manger en débutant toujours par le bar de Mari.

Mari devient elle aussi mon amie et Takashi doit jouer le rôle d’interprète en permanence, ce qu’il fait avec beaucoup de talent et de gentillesse. La 金沢のチーム était née en ce début d’été 2018.

金沢のチーム
Kanazawa no chimmu – la Kanzawa team.

Kanazawa n’est pas qu’une ville de divertissements et d’amitiés, c’est aussi une ville magnifique qui attire de plus en plus de monde, surtout depuis qu’il y a un Shinkansen direct de Tokyo. Il faut moins de trois heures pour y aller.

Cette semaine, après avoir passé trois ans sans eux, j’ai beaucoup fait la fête avec Mari et Takashi jusque tard dans la nuit, j’ai rencontré beaucoup de Japonais mais j’ai aussi pris le temps de revoir les endroits que j’aime.

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